Le titre de cet ouvrage dit exactement ce qu’il est : spécialiste reconnu de mythologie comparée, l’auteur part, à la suite de G. Dumézil – dont il revendique expressément l’héritage –, du postulat qu’il existait une mythologie indo-européenne et que la comparaison des mythes présents dans les littératures composées dans les langues de cette famille doit permettre d’en reconstruire certains aspects essentiels. Par « mythologie », il convient d’entendre ici, précise-t-il, un ensemble structuré de récits portant sur les dieux et leurs relations avec les hommes, sur le monde et la société, sur la cosmogonie et le devenir de l’univers. Ce postulat semble aller de soi, mais il se heurte à différents obstacles, en particulier l’absence de critères rigoureux pour valider les hypothèses de reconstruction, tels que ceux dont dispose la grammaire comparée – il ne faut pas oublier que le concept d’indo-européen est d’abord un concept linguistique –, d’où découle le risque constant de sur-interpréter les faits en leur appliquant des grilles de lecture dont la pertinence, pour chacun des domaines culturels envisagés, est toujours sujette à caution. Une autre difficulté réside dans l’hétérogénéité des sources, tous les peuples de langue indo-européenne n’ayant pas élaboré une littérature spécifiquement mythologique, comme les Grecs avec, entre autres, la Théogonie d’Hésiode, ou les Scandinaves avec l’Edda ; certains ont transposé leurs mythes dans des récits épiques, à l’instar des Indiens, qui nous montrent les dieux agissant à travers leurs avatars humains, ou historiques, comme les Romains exposant les origines légendaires de l’Urbs. Ces difficultés, D. Briquel ne les ignore pas et dans la sorte de captatio benevolentiae par laquelle il commence son introduction générale, il les évoque explicitement, rappelant le caractère nécessairement hypothétique des reconstructions proposées, en même temps que l’indéniable fécondité de l’approche structurale développée par G. Dumézil, qu’il entend appliquer lui-même avec une rigueur et une ambition comparables. Il se livre ensuite, chapitre après chapitre, à un patient travail de reconstruction, qui porte sur un ensemble de mythèmes dont il découvre et rassemble les traces dans de multiples sources littéraires émanant non seulement de la documentation romaine, qui constitue plus particulièrement son domaine de spécialité, mais aussi de celle que nous ont transmise la Grèce, l’Iran, les mondes germanique et celte.
Le livre est un recueil de vingt-et-un articles parmi les plus représentatifs des travaux de l’auteur, publiés entre 1978 et 2016 dans diverses revues francophones, comme la Revue de l’histoire des religions (quatre articles), le Bulletin de l’association Guillaume Budé (deux articles), la Revue des études latines, la Revue de philologie et d’histoire, Ollodagos – Actes de la société belge d’études celtiques (un article dans chacune), dans des actes de colloques, des ouvrages collectifs ou des mélanges. Certains articles, ainsi que leur titre l’indique, sont de simples notes, qui occupent quelques pages. D’autres, beaucoup plus nombreux, sont des articles de fond. Trois sont inédits et un à paraître, ce qui montre qu’il ne s’agit pas seulement d’études anciennes dans la carrière de l’auteur, mais aussi de travaux récents. C’est d’ailleurs là un trait remarquable de l’ouvrage : les articles qui y sont rassemblés dessinent un tableau cohérent, reliés qu’ils sont par trois fils conducteurs qui chacun assurent l’unité d’une de ses trois grandes parties. Outre une introduction générale, qui précise l’ambition du livre, en résume la méthode et le situe dans l’histoire de la discipline, chacune de ces trois parties commence par une introduction spécifique dans laquelle l’auteur présente le ou les objets étudiés dans les articles qu’elle rassemble.
L’Introduction générale (p. XI‑XVII) définit l’entreprise de son auteur à la fois comme un prolongement et un approfondissement critique des travaux de G. Dumézil : il s’agit d’un « dialogue » de plus de quarante ans avec ce que les Américains ont appelé new comparative mythology. Les deux premières parties, est‑il précisé, s’inscrivent dans le prolongement direct de l’œuvre de G. Dumézil, en particulier dans les trois volets Mythe et épopée (1968‑1973), son magnum opus, et des champs de recherche qu’il a ouverts mais dont il n’a pas achevé l’exploration. Elles traitent de deux mythèmes (l’auteur emploie le mot « schème ») qui s’y trouvaient déjà identifiés, celui de la « bataille eschatologique », qu’il préfère nommer « bataille finale », et celui du « feu dans l’eau ». Il s’agit là de compléter les recherches de G. Dumézil, notamment en les étendant à des domaines qu’il avait laissés plus ou moins de côté, comme le domaine grec, et de les systématiser. La troisième partie, au contraire, ne porte pas sur un mythème unique mais assume une certaine diversité thématique ; elle s’éloigne également davantage des travaux de G. Dumézil, soit qu’elle s’efforce d’en corriger ce que l’auteur juge erroné ou insuffisant, par exemple à propos des dieux romains Quirinus et Diane, soit qu’elle s’attache à des thèmes qu’il n’avait pas étudiés, tel le combat d’Hercule et Cacus. D. Briquel souligne que dans ce dialogue, il ne se fonde pas seulement sur les travaux de G. Dumézil, mais aussi sur ceux, souvent plus récents, de plusieurs autres chercheurs, aussi bien des comparatistes qui constituent en quelque sorte la « lignée » de ce savant (F. Vian, B. Sergent, D. Dubuisson, F. Delpech, J.-L. Desnier, P. et A. Sauzeau), que des hellénistes ayant adopté une perspective synchronique (J.-P. Vernant, M. Détienne, P. Vidal-Naquet – c’est-à-dire les membres du centre Louis Gernet) : cela lui permet de « croiser » de manière féconde les résultats de la recherche comparative et de celle qui porte plus spécifiquement sur le domaine grec, relevant de l’anthropologie historique. Il ajoute enfin que la célèbre tri-fonctionnalité, à laquelle on réduit trop souvent ce qu’on peut reconstruire de la mythologie indo-européenne, ne constitue pas le thème central des études réunies dans le volume : il s’attache au contraire à explorer d’autres structures, dont certaines avaient été identifiées mais peu étudiées par G. Dumézil, tandis que d’autres représentent de nouveaux champs de recherche. Les trois fonctions, précise d’ailleurs l’auteur, constituent souvent un outil ou un procédé narratif commode, mais dépourvu de signification propre, offrant simplement un cadre à des récits porteurs d’enjeux tout autres.
La première partie (p. 3-198), intitulée « Les combats des dieux : la mise en place de l’ordre du monde et son devenir », rassemble, outre une introduction, huit articles. Y est étudié le mythème de la « bataille finale », qui trouve sa traduction, selon les sources et les aires culturelles auxquelles elles appartiennent, soit dans une fin à venir de l’univers, le « crépuscule des dieux », soit dans l’advenue heureuse de l’ordre actuel, au terme d’un conflit fondateur situé dans le passé et ayant conduit à l’établissement d’une forme de souveraineté bénéfique. Le point de départ des recherches présentées dans cette partie de l’ouvrage est en effet le schème de la « bataille eschatologique », repéré par G. Dumézil dans Mythe et épopée I (1968) à partir des sources épiques indiennes et scandinaves. L’expression adoptée par D. Briquel, qui la reprend à S. O’brien[1], se justifie par le fait que dans la majorité des cas, la crise a eu lieu dans le passé de la communauté productrice des sources consultées. C’est le cas en Grèce, où Zeus a vaincu Cronos et les Titans, puis surmonté la menace que son projet de mariage avec Thétis ou Métis (selon qu’on suit Eschyle ou Hésiode) faisait peser sur la continuité de sa souveraineté ; c’est aussi le cas à Rome, où, dans le discours des historiens des origines de l’Urbs, l’éviction des Tarquins (509 av. J.-C.) constitue l’étape décisive qui a permis l’établissement durable de la communauté dans les cadres juridiques et sociaux de la libera res publica (Le titre du cinquième article, « La naissance de la république romaine comme avènement d’un monde parfait : arrière-plan eschatologique du récit traditionnel », p. 119-138, est significatif de ce possible devenir du schème eschatologique représenté tout autrement dans le Mahābhārata ou l’Edda). La crise, qu’elle soit eschatologique et à venir ou fondatrice et révolue, comporte une transformation essentielle : le passage d’une souveraineté de type varunien (fondée sur la magie et le pouvoir de lier, de nature plus ou moins terrifiante) à une souveraineté de type mitrien (fondée sur l’ordre, le contrat et la juste répartition, de nature bienveillante). Ce sont là en effet les deux aspects complémentaires de la souveraineté indo‑européenne, que G. Dumézil avait identifiés. C’est ainsi que Zeus succède à Cronos dans la mythologie grecque, Jupiter à Saturne dans la religion romaine, Yudhiṣṭhira à Pāṇḍu dans l’épopée indienne, où ces deux rois humains sont les représentants, au sein d’une structure trifonctionnelle, des deux formes successives de souveraineté. D. Briquel démontre, de manière très convaincante, que cette transformation de la souveraineté est également représentée dans des sources et dans des récits que son prédécesseur avait renoncé à explorer, ou dont il avait seulement ébauché l’étude : la cosmogonie grecque telle que représentée dans la Théogonie d’Hésiode, par exemple – on sait que G. Dumézil se montrait très réticent s’agissant de reconnaître un héritage indo‑européen dans les mythes grecs, jugés tributaires d’une influence orientale qui en a bouleversé les contours –, dans l’éviction des Tarquins à Rome ou, ultérieurement, dans l’invasion gauloise conduite par Brennus, d’abord victorieuse puis repoussée par les Romains (390 av. J.‑C.). D. Briquel, qui montre que des schèmes récents, éventuellement empruntés, peuvent recouvrir des schèmes anciens, hérités quant à eux, tout en conservant certains de leurs traits structurants, s’attache tout particulièrement à deux types de figures, déjà reconnues par G. Dumézil mais dont il débusque des avatars que celui-ci n’avait pas toujours prévus : d’une part, le « dieu cadre » (Ouranos, le védique Dyaúḥ à travers son avatar épique Bhīṣma, Janus, le scandinave Vidarr), qui précède la succession des souverains varunien puis mitrien ; d’autre part les « auxiliaires de la souveraineté », couples de personnages qui, appartenant à la génération du souverain varunien, prêtent un concours décisif au souverain mitrien, dont ils favorisent l’avènement : les Cyclopes et les Hécatonchires, frères de Cronos que Zeus libère et qui lui procurent le foudre ; Prométhée et son frère Épiméthée, qui évitent à Zeus d’être à son tour détrôné en le prévenant du caractère funeste des noces qu’il projette ; Vidura et Dhṛtarāṣṭra dans le Mahābhārata, ainsi que les dieux Aryaman et Bhaga ; Hödr et Baldr dans l’Edda ; la déesse Juventas et le dieu Terminus dans le mythe de l’installation de Jupiter sur le Capitole, auprès duquel seuls ils exigent et obtiennent de conserver leur sanctuaire.
La deuxième partie de l’ouvrage (p. 199-232) s’intitule « Le feu dans l’eau », et regroupe également huit articles, qui traitent eux-aussi de la question de la souveraineté à travers ce mythème associant paradoxalement deux entités en principe contraires. Le point de départ en est « La saison des rivières », la première partie de Mythe et épopée III (1973), dans lequel la comparaison d’un récit iranien relatant la vaine tentative d’un roi ennemi de s’emparer du xvarənah immergé dans les eaux, d’un récit irlandais relatant l’explosion du puits Nechtan et du récit romain de l’éruption du lac albain, permet à l’auteur d’assigner la figure du feu dans l’eau à la préhistoire indo-européenne – il est représenté dans le monde indo-iranien par Apṃ nápāt, le « petit-fils des eaux » (nommé ici sous sa forme védique). Ce thème, illustré par des faits très abondants, a suscité plusieurs études ultérieures, par exemple celles de Jean-Luc Desnier (1995, 1997), et D. Briquel, dans ces quelques articles, y apporte sa propre contribution. Il décèle des avatars du « feu dans l’eau » dans plusieurs récits, comme celui que fait Hérodote de la prise de Babylone par Cyrus, qui ne l’emporte qu’après avoir maîtrisé le fleuve Gyndès (Enquête, I, 189‑190), ou dans celui qui concerne les biens des Tarquins, revendiqués par ces derniers après leur éviction de la cité et comportant une grande quantité de blé récemment récolté que les Romains préfèrent jeter dans le Tibre, donnant naissance à ce qui deviendra l’île tibérine – ou encore dans le mythe germanique de l’or du Rhin, conté dans l’Edda et la Chanson des Nibelungen, qui évoque le trésor des rois burgondes déposé dans le fleuve par Hagen afin de le soustraire à l’ennemi. Il montre ainsi que ce feu aquatique ne joue pas seulement un rôle punitif, mais aussi un rôle positif, celui d’une sorte d’ordalie royale, d’épreuve de qualification à laquelle doit se soumettre le prétendant à la souveraineté, qui n’accède à celle-ci qu’en le maîtrisant. Le dernier article de la deuxième partie, « Le combat de Jacob contre Dieu et le schème indo‑européen du passage du fleuve » (p. 323-332) propose de voir dans le récit biblique un emprunt au mythe indo-européen.
La troisième partie, « Figures divines et héroïques » (p. 333-463) comporte, outre l’habituelle introduction, cinq chapitres. L’auteur y regroupe des études portant sur des sujets divers, et non plus regroupés autour d’un schème unique. Ces études s’éloignent davantage des travaux de G. Dumézil, dont elles cherchent à rectifier ce qui y apparaît comme des erreurs. Le premier article (p. 365-368) est consacré à Quirinus, dont la position dans la première triade capitoline ne laisse pas de surprendre, tant ses attributions paraissent de première et non de troisième fonction. D. Briquel reprend à son compte l’étymologie proposée par Paul Kretschmer en 1920, *co‑wir‑inos, qui conduit à voir dans ce dieu le représentant des hommes rassemblés, et conclut, à la suite de D. Porte en 1980, qu’il est le « dieu des citoyens ». Or, à l’instar du roi dans d’autres traditions, le civis romanus, dans le cadre de la res publica, est un être complet, déployant son action dans les trois directions fonctionnelles – paysan en temps de paix, soldat en temps de guerre, magistrat dans la vie publique et prêtre dans la vie domestique. En cela, il se rapproche d’Ancus Marcius, le roi pré-étrusque représentant la troisième fonction mais dont la carrière est tripartite. Le second article concerne Hermès, qui n’a jamais été étudié dans une perspective comparative, mais dans lequel l’auteur voit une sorte de synthèse des aspects portés par les deux « auxiliaires de la royauté », ce qui expliquerait son ambiguïté dans les mythes qui le mettent en scène. Il serait ainsi, dans le panthéon, le pendant des Cyclopes et des Hécatonchires du mythe cosmogonique. Les deux articles suivants sont consacrés aux déesses romaines Junon et Diane, dont le lien avec le cycle lunaire et la correspondance calendaire amènent l’auteur à y voir deux figures complémentaires, représentation double de la déesse trifonctionnelle qu’incarnent chez les hommes Lucrèce et Clélie lors de la naissance de la res publica, ou, dans l’épopée indienne, Draupadī, l’épouse commune des représentants des trois fonctions. Le dernier article (p. 425‑463), enfin, le plus long de ceux qui sont regroupés dans cet ouvrage, évoque l’affrontement d’Hercule et de Cacus, après que le second a volé puis enfermé dans une caverne les bœufs amenés par le premier. Selon l’auteur, Hercule, transposition romaine de l’Héraklès grec, honoré selon le rite grec (où le prêtre officie tête nue) au Forum Boarium, sur l’Ara Maxima, est le substitut d’un héros indigène plus ancien. Le mythe qui l’oppose à Cacus aurait donc supplanté un mythe local qui serait l’avatar latin de ce que B. Lincoln, en 1976, appelait « the cattle‑raiding myth » indo‑européen (M. Bréal, en 1863, le rapprochait du mythe védique d’Indra affrontant le démon Vṛtra). D. Briquel souligne un trait essentiel du mythe, à partir duquel il pense pouvoir en dégager la signification : son étroite corrélation avec l’institution d’un sacrifice particulier. Ce serait donc à l’origine un mythe énonçant la naissance de l’acte sacrificiel.
L’ensemble de l’ouvrage de D. Briquel, que complète une riche bibliographie (p. 465-486) qui peut servir de bibliographie de référence en mythologie comparée, se révèle d’une lecture passionnante autant qu’instructive. Parfaitement documenté, toujours argumenté avec la plus grande rigueur, il ne fait pas que reprendre et prolonger l’héritage dumézilien, il en rectifie certaines erreurs et en enrichit considérablement l’entreprise comparative par l’exploration de sources et de schèmes nouveaux ou peu explorés. L’auteur, en effet, ne tombe jamais dans le travers de ceux qu’on appelle parfois des « épigones », qui appliquent aveuglément un modèle théorique, en forçant au besoin les faits pour les faire cadrer avec celui-ci, sans en percevoir les failles ni, de ce fait même, les potentialités. Il se montre au contraire d’une extrême prudence dans ce qu’il avance, prenant soin de l’étayer au moyen d’un dossier comparatif solide, et met en œuvre de manière à la fois systématique et nuancée la méthode structurale d’analyse des contenus narratifs (les tableaux des pages 89-90, 123‑124, 164, 319, 404 en sont l’illustration). Deux mérites reviennent indéniablement à cet ouvrage, l’un et l’autre reposant sur une certaine audace comparative : celui de contribuer à élargir la mythologie comparée à d’autres schèmes que celui des trois fonctions et celui de donner toute leur place aux mythes grecs dans l’effort de reconstruction, place que G. Dumézil, par excès de prudence peut-être, avait manqué à leur attribuer. On pourrait ajouter, s’agissant du monde grec en particulier, que l’auteur est magistralement parvenu à intégrer à sa démarche comparative les résultats des recherches menées par les membres du centre Louis Gernet. On se permettra une menue critique et quelques suggestions. Il est juste, sans doute, de présenter Vidura et Yudhiṣṭhira, dans le Mahābhārata, comme des représentants de la souveraineté mitrienne ; mais il faudrait préciser qu’à l’inverse des autres représentants fonctionnels de l’épopée, ils ne sont pas les avatars du dieu correspondant, en l’occurrence Mitra, mais de Dharma, personnification d’une notion abstraite et divinité en quelque sorte artificielle, destinée à servir de substitut à un dieu qui, à l’époque de la composition du poème, avait perdu son identité et sa fonction védiques (Dumézil en fait la démonstration dans la première partie de Mythe et épopée I, 1968). Au chapitre des suggestions, il ne serait peut-être pas inutile de rappeler qu’Apṃ nápāt, incarnation indo-iranienne du « feu dans l’eau », est justement en védique une appellation d’Agni, le dieu du feu sacrificiel. Le thème de la razzia sur le bétail est présent dans le Mahābhārata, à la fin du Virāṭaparvan (IV, 24-67), dans l’épisode où Suśarman s’empare des vaches du roi Virāṭa, suscitant l’intervention du guerrier Arjuna. On le retrouve également dans le mythe védique du meurtre de Vāla, le démon caverne qui emprisonne les vaches de l’aurore et que pourfend Indra de son foudre. Ce sont là quelques pistes qui mériteraient peut-être d’être explorées plus avant, bien qu’on ne puisse garantir a priori leur fécondité. Il n’en reste pas moins qu’À la recherche d’une mythologie indo-européenne est un livre exemplaire, dont la lecture ne peut qu’être vivement recommandée à quiconque s’engage dans l’étude de la mythologie comparée, ou tout simplement s’intéresse aux mythes des mondes anciens.
Sylvain Brocquet, Université d’Aix-Marseille, UMR 7297 – « Textes et documents de la Méditerranée antique et médiévale »
Publié dans le fascicule 2 tome 125, 2023, p. 572-577.
[1]. « Indo‑european Eschatology : a Model », JIES 4, 1976.