L’ouvrage proposé par Patrick Sänger, une version révisée de sa thèse soutenue en 2009, est l’étude d’un ensemble de 19 documents constituant les archives de deux vétérans de l’armée romaine, T. Aelius Sarapammon et Aelius Syrion. Sept des documents étaient déjà connus, mais l’auteur en donne une version largement révisée. Les douze autres sont publiés pour la première fois. Ces archives privées proviennent du village d’Ankyronon et recouvrent la période sévérienne et le début de l’anarchie militaire (jusqu’en 255 apr. J.-C.). Ces papyrus, trouvés dans le nome hérakléopolite, permettent de compléter les renseignements concernant les vétérans donnés par les papyrus, qui ne provenaient jusqu’à présent que du nome arsinoïte. Ils sont l’occasion pour l’auteur de mener une étude socio-économique et de voir si la situation des vétérans, jusque-là privilégiée, a connu un déclin à partir de 212 apr. J.-C. Pour lui, la réponse est négative.
Le livre est divisé en huit chapitres. Les cinq premiers sont consacrés à une présentation des archives (p. 15-115). Contexte historique d’abord, avec la pratique du recrutement romain en Égypte et l’étude des vétérans à l’époque sévérienne et au début de l’anarchie militaire. La comparaison avec ce qui se passe dans les autres provinces est rapide. Contexte géographique ensuite (si l’exposé est détaillé, une carte aurait cependant été bien utile). Vient ensuite la présentation des deux vétérans de la légion II Traiana fortis, T. Aelius Sarapammon étant un ancien signifer et Aelius Syrion un ancien optio. Il s’agit donc de deux sous-officiers. C’est l’occasion pour l’auteur d’aborder la question du montant des différentes sommes reçues par les soldats au cours de leur service. Un exposé concernant des problèmes particuliers clôt cette présentation. Il s’agit essentiellement de problèmes juridiques et administratifs soulevés par la nature même des documents : actes de procès, déclaration de cens, gestion des domaines impériaux, privilèges accordés par les empereurs aux vétérans…
Le chapitre 6 est le plus important, il concerne l’édition des textes (p. 116-339). L’auteur présente d’abord les archives de façon générale, puis étudie les documents selon l’ordre chronologique, en commençant donc par les archives d’Aelius Sarapammon. Outre une introduction conséquente, l’auteur donne chaque fois le texte, l’apparat critique, la traduction quand le texte n’est pas trop fragmentaire et un commentaire, surtout philologique. Les archives d’Aelius Sarapammon comportent entre autres deux pétitions, l’une envoyée à l’archidikaste et l’autre au préfet d’Égypte, un engagement sous serment à assister à un procès, la copie d’une déclaration faite lors du cens, une déclaration d’abrochia, c’est-à-dire de terre qui n’a pas été (ou pas assez) inondée, un bail et une lettre privée. Certains des documents présentés sont vraiment très fragmentaires, et peuvent difficilement être exploités. Les archives d’Aelius Syrion sont plus riches, mais les papyrus sont aussi parfois très fragmentaires. Elles comptent également des pétitions (à des préfets d’Égypte, à un centurion ou à un décurion), des baux et de la correspondance privée et officielle.
Les derniers chapitres sont des annexes (p. 340-413). Patrick Sänger propose différents tableaux organisés en fonction des sujets abordés par les archives qu’il vient d’étudier et regroupant les papyrus qui concernent ces sujets ou des sujets analogues. Il termine par une récapitulation des corrections proposées dans le chapitre 6. Une bibliographie très importante, différents index et quatorze planches avec les photographies des papyrus complètent l’ouvrage.
L’auteur nous offre au total un livre très intéressant, précieux pour l’histoire sociale, administrative et économique de l’Égypte de la fin du IIe et du début du IIIe siècle apr. J.-C.
Catherine Wolff