Abdelaziz Belfaida, historien de l’Antiquité, enseigne à l’université de Kénitra au Maroc. Auteur d’une thèse intitulée Le culte des divinités des eaux en Afrique du Nord à l’époque romaine, soutenue en 1987 à l’université de Bordeaux III, il a, depuis, poursuivi des recherches sur cette thématique. Aujourd’hui il veut en quelque sorte mettre le fruit de ses propres travaux et de ceux d’autres savants au service et à la portée de tous. D’où ce petit livre qui s’adresse au grand public et à des étudiants débutants ou non spécialistes. Ainsi que l’écrit l’auteur de la préface, Nacéra Benseddik, professeur à l’École des Beaux Arts d’Alger, « les eaux […], de tout temps, se placent au carrefour du sacré, du merveilleux, du surnaturel, comme du social et de l’économique » (p. 13) ; c’est ce que reflète le plan en deux grandes parties choisi par notre collègue : « Eau et sacré » et « Eau et utilité publique ». Son étude est basée sur les témoignages littéraires, mais aussi sur les inscriptions, les mosaïques, les peintures, les restes de monuments et de bâtiments qui ont été mis au jour au Maghreb, ce qu’illustrent les planches et la reproduction de la p. 112. Il relève ainsi dans la première partie toutes les divinités pour lesquelles ces documents attestent un rapport à l’eau, des plus grandes aux plus petites, des plus connues en tant que déités aquatiques à celles qui ne sont qu’occasionnellement liées à cet élément. À chacune est consacrée une notice succincte qui renvoie à de nombreuses sources bibliographiques. Puis la seconde partie se penche selon la même méthode sur la politique de gestion de l’eau en s’intéressant successivement à ses aspects juridiques, techniques et financiers. A. Belfaida est un bon pédagogue, doté d’un esprit très clair, et ces qualités rayonnent dans ces développements construits selon un plan extrêmement net. Un des points forts de ce travail est sa volonté de mettre en lumière une histoire sans solution de continuité. Aussi notre confrère insiste-t-il sur les jeux combinés du substrat et du superstrat et montre-t-il comment, par exemple, certaines divinités romaines ont été parfois perçues dans le Maghreb antique à la lumière de croyances et de pratiques antérieures à la Romanisation. De subtiles analyses lui permettent de faire un tri entre ce qui est le fait de Romains ou d’Africains romanisés et ce qui ressortit à des coutumes indigènes. S’il remonte le temps, il le descend aussi puisque chaque fois que c’est possible il évoque l’évolution postérieure et la survie de certains usages, quelquefois jusqu’à notre époque. Ce livre de vulgarisation remplira tout à fait son office d’information ; en outre, aux lecteurs dont il éveillera la curiosité il offre une ample bibliographie (dont les derniers titres sont de 2010) qui leur permettra de satisfaire celle-ci.
Lucienne Deschamps