L’ouvrage relate la construction de la réplique expérimentale de l’épave Jules-Verne 9, appelée le Gyptis, sous la direction de Patrice Pomey assisté de Pierre Poveda. Découverte à Marseille en 1993 lors d’une fouille préventive, l’épave Jules-Verne 9, datée du milieu du VIe siècle av. l’è. chr., présentait la particularité d’être entièrement « cousue », c’est-à-dire que sa coque était assemblée au moyen de ligatures végétales. Ce système d’assemblage est caractéristique des navires grecs de l’époque archaïque. Il disparaît progressivement au cours de l’époque classique. Il est remplacé par un système d’assemblage par tenons et mortaises.
La construction de la réplique, conçue par l’équipe d’archéologie navale du Centre Camille Jullian (AMU, CNRS, MCC) menée par Patrice Pomey, a été effectuée à l’occasion des événements organisés lorsque Marseille reçut le titre de Capitale européenne de la culture en 2013. Le Gyptis a ainsi rejoint une parade navale et continue aujourd’hui de sortir régulièrement. Mais il ne doit pas être confondu avec les nombreux navires antiques construits çà et là. Car la construction du Gyptis respecte scrupuleusement les caractéristiques techniques de l’épave Jules-Verne 9 afin d’obtenir une réplique aussi fidèle que possible du navire originel, long de 9,85 m. Les essences et les matériaux sont donc choisis rigoureusement. Le travail, mené conjointement par des archéologues et des charpentiers de marine, a été effectué avec des outils contemporains, comme la perceuse, pour percer les trous destinés à accueillir les ligatures. Car le premier objectif n’est pas de vérifier les outils de charpenterie navale, mais de contrôler les techniques de construction de la coque et la pertinence des restitutions proposées.
L’autre objectif était d’évaluer les performances nautiques du navire. Il est pourvu d’un système de propulsion mixte, à voile et à rames (5 paires d’aviron). Il est gréé d’une voile carrée en tissu de lin et de coton. Les navigations expérimentales ont montré que le Gyptis devait charger un lest de 620 kg afin de rester dans ses lignes. Il atteint une vitesse de 3,5 nœuds avec 3 paires d’aviron et de 5 à 6 nœuds avec la voile. Les gouvernails latéraux ne sont pas utilisés en même temps. On n’utilise que celui qui est sous le vent, tandis que l’autre est relevé.
Ce projet d’archéologie expérimentale a suivi une démarche scientifique très rigoureuse, sans doute jamais atteinte jusqu’à présent pour la réplique d’un navire antique. L’ouvrage constitue ainsi l’une des premières publications témoignant du caractère exceptionnel de ce projet. Les nombreuses photos, réalisées par l’équipe du Centre Camille Jullian (Loïc Damelet, Christine Durand et Philippe Groscaux), sont accompagnées d’un texte et de légendes rédigés par les responsables du projet, Patrice Pomey et Pierre Poveda. L’ouvrage ne s’adresse pas à des spécialistes d’archéologie navale, qui trouveront les résultats détaillés de cette tentative d’archéologie expérimentale dans des articles et des ouvrages scientifiques. Il est destiné à des lecteurs passionnés de marine et d’archéologie qui pourront comprendre aisément l’intérêt de ce projet. Ces derniers pourront également voir le documentaire réalisé récemment sur le sujet.
Emmanuel Nantet, Université du Maine
Publié en ligne le 05 février 2018