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Ce livre constitue un Addendum de l’auteur à son ouvrage paru chez Brill en 2006, The Visigoths in Gaul and Iberia. A Supplemental Bibliography, 1984-2003, lui-même prenant la suite de la bibliographie qu’il avait publiée sur le même thème en 1988 (The Visigoths in Gaul and Spain A.D. 418-711. A Bibliography). L’intérêt de ces nouveaux volumes est d’abord qu’ils permettent de mesurer l’ampleur des changements intervenus depuis 1988 dans ce champ historiographique. Comme le signale lui-même l’auteur dans l’introduction de 2006, la bibliographie est en vingt ans devenue « proliférante », en particulier dans les deux pays les plus concernés par ce chapitre de l’histoire européenne, l’Espagne et le Portugal – et il faut saluer, à ce propos, le changement de titre, qui dissipe l’abusive assimilation entre Hispanie et Espagne. Une telle multiplication des références bibliographiques, si elle témoigne d’un regain d’intérêt très positif pour le monde visigothique, n’en est pas moins inquiétante, quand elle est le résultat de publications qui se succèdent sur un même thème sans apporter rien de plus aux précédentes. Rappelons ici, pour qui en douterait, que la qualité de la recherche n’est pas mesurable à l’aune bibliométrique, et qu’un tel mode d’évaluation, s’il est exclusif, a tendance au contraire à influer négativement sur la qualité des productions qu’il est censé estimer.
L’entreprise est donc titanesque : les 303 pages de l’Update viennent compléter les 889 pages du volume de 2006, presque 1200 pages pour 22 ans de production bibliographique. En dépit de son titre, l’Update ne concerne d’ailleurs pas seulement les années 2004‑2006, mais recense des références manquant dans les volumes précédents et remontant aux années 60 à 80, parfois même plus anciennes. Il représente donc un complément indispensable aux deux premiers volumes. Qu’un travail de ces caractéristiques, accompli seul, souffre de quelques défauts de présentation paraît inévitable. S’il n’est pas question d’en évaluer l’exhaustivité, encore plus problématique à obtenir aujourd’hui qu’il y a vingt ans, certains aspects paraissent néanmoins améliorables. On peut ainsi regretter la disproportion entre l’unique et court chapitre sur les aspects sociaux, politiques et économiques et les nombreux et longs chapitres concernant la religion. Mais la classification générale en chapitres aurait également gagné à être modernisée. Peu d’historiens s’autorisent en effet aujourd’hui à parler « d’invasions » germaniques, et encore moins à les rapprocher de la conquête musulmane, les deux phénomènes historiques étant totalement différents dans leur contexte et leurs modalités. Dans le monde visigothique, la séparation entre « Civil Law » et « Canon Law » n’est pas aussi justifiée qu’elle le paraît au premier abord ; il semble également dommage que Martin de Braga et Orose se trouvent « exilés » dans une partie « Suèves » au lieu de figurer avec le reste de la patristique. Plus ennuyeux pour une utilisation commode du recueil, les productions d’un même auteur ne sont pas ordonnées chronologiquement au sein d’un même chapitre. Si, pour l’Update, ce problème reste secondaire, il était extrêmement gênant dans la Bibliographie de 2006 qui couvre une période de vingt ans, en particulier pour certains auteurs très prolifiques. Ce défaut est aggravé par le parti-pris de donner systématiquement deux entrées, l’une pour le colloque ou l’ouvrage collectif, l’autre pour la contribution sélectionnée en son sein, y compris lorsque le recueil n’est cité que pour une unique contribution, ce qui est souvent le cas. Il faut alors se reporter à l’entrée du colloque ou du recueil correspondant, des dizaines ou des centaines de pages plus loin, pour connaître la date de l’article. Outre l’obstacle que ce détail constitue pour un maniement optimal de la bibliographie, on peut s’étonner d’un choix éditorial qui multiplie, de ce fait, le nombre d’entrées et donc celui des pages. C’est sur ce dernier aspect que je terminerai. À quoi bon, en 2006 ou 2008, 1200 pages coûteuses et moins maniables (malgré la présence bienvenue d’index dans les deux volumes) qu’une publication électronique, plus accessible, plus facile à consulter à partir de critères combinables entre eux, et plus facile également à mettre à jour ? L’auteur annonce heureusement qu’un accord avec l’éditeur donnera lieu sous peu à une version électronique du livre de 2006, puis d’une actualisation de la Bibliographie publiée tous les trois ans. C’est une excellente nouvelle ; mais dans un contexte où les ressources allouées à la recherche en sciences humaines s’amenuisent de toutes parts, l’idée même d’une publication de cette nature en version papier n’était peut-être pas totalement justifiée.

Céline Martin