Bien qu’elle ne soit pas la plus grande des villes romaines de la province de Lusitanie, Conimbriga est la mieux préservée. Les fouilles archéologiques entamées à la fin du XIXe s., entre 1929 et 1964, puis lors des campagnes organisées par la mission archéologique française au Portugal entre 1964 et 1974, ont permis de dégager plusieurs monuments de la ville antique. Le forum, les bains publics ou l’enceinte de l’Antiquité tardive présentent un état de conservation qui n’a parfois rien à envier aux exemples italiens. De même, plusieurs domus richement équipées ont été mises en évidence. Elles restent des références puisque les exemples d’édifices privés ne sont pas légion pour cette partie de la péninsule ibérique. C’est dans ce contexte que s’insère ainsi l’ouvrage de Virgilio Hipolito Correia. Issu d’une thèse de doctorat soutenue en 2011 à l’Université de Coimbra, ce travail publié dans les annexes d’une des plus prestigieuses revues d’archéologie portugaise, Conimbriga, comporte 417 pages et 157 illustrations.
L’auteur débute par un chapitre introductif présentant l’histoire des fouilles archéologiques sur le site de Conimbriga, et en particuliers celles relatives à l’architecture domestique, puis tente de réaliser un état de la question pour les autres provinces de l’Empire romain. Bien que l’ambition de ce tour d’horizon ne visait pas à l’exhaustivité, on regrettera néanmoins l’absence de quelques références bibliographiques plus récentes, notamment en ce qui concerne les provinces gauloises, où les études sur l’architecture domestique ont fait l’objet de nombreux progrès ces dernières années. De même, si les études sur l’habitat domestique font effectivement figure de parents pauvres dans cette partie de la péninsule ibérique, on déplorera l’absence de comparaisons avec d’autres exemples urbains provinciaux et extra-provinciaux. À titre d’exemple, on aurait aimé voir dans la bibliographie le travail de Jorge Manuel Pinto Ribeiro sur l’architecture domestique de Bracara Augusta (Braga, Portugal).
La première partie concerne le corpus des édifices domestiques de Conimbriga organisé sous forme de fiches. Ces dernières sont très bien agencées et s’avèrent particulièrement bien appropriées à ce genre d’exercice. On déplorera le manque de plan général pour localiser chaque maison dans la ville antique. La qualité des illustrations est également en deçà de ce qui est normalement attendu pour ce type d’ouvrage.
Une réflexion globale sur l’architecture domestique de Conimbriga est tentée dans la seconde partie. Dans le premier chapitre appelé « l’écologie » de la construction, l’auteur passe rapidement sur les matériaux et techniques de construction, qui méritaient, à notre sens, une analyse plus détaillée. L’auteur s’attache ensuite à présenter les différents types de plan sous la forme d’une typologie. Si la mise en évidence de maisons présentant un plan de type “indigène”, autour d’une cour centrée est pertinente, la typologie est somme toute assez simpliste et concerne essentiellement les maisons à péristyle. Ces dernières constituent en fait le sujet principal de cet ouvrage, comme le montre l’analyse des espaces de la maison. Ce chapitre est assez bien mené, mais on regrettera que l’auteur fonde sa réflexion uniquement sur les pièces dotées de mosaïques, sans prendre en compte l’ensemble des composantes de la domus à péristyle. L’analyse des décors, qui fait suite, est de bonne qualité, et constitue sans doute le chapitre le mieux réussi de cet ouvrage. Enfin, l’analyse urbanistique qui clôt cette partie apparaît claire et précise. Dans la conclusion, l’auteur insiste pour finir sur le phénomène de la romanisation autour de Conimbriga.
En définitive, cet ouvrage, nonobstant les quelques réserves que l’on a pu faire, constitue sans aucun doute la référence sur l’architecture domestique en Lusitanie romaine. On déplorera de manière générale la mauvaise qualité des illustrations qui dilapide de quelque peu la valeur de cet excellent travail. La ligne éditoriale des annexes de la revue Conimbriga en est probablement responsable.
Tony Silvino
Mis en ligne le 25 juillet 2017