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Le présent volume est en fait la publication des actes de la XVe rencontre franco-italienne d’épigraphie du monde romain, qui s’est tenue à Paris du 4 au 6 octobre 2008. De ce fait, les auteurs, souvent des habitués de ces rencontres, ont traité tantôt des sujets généraux, tantôt des points de détail suggérés par de nouvelles inscriptions ou de nouvelles lectures, liés d’une manière ou d’une autre avec le monde colonial, tantôt, enfin, des monographies sur des inscriptions inédites ou revues sans lien explicite avec le titre. Le volume est donc composé de deux parties, bien que la ligne de partage ne soit pas toujours évidente pour le lecteur. Le thème se justifiait, selon l’introduction, par la publication très récente de lois municipales, qui n’occupent, au final, guère de place dans le volume. On ne s’attendra donc pas à une monographie collective sur tel ou tel aspect des colonies dans le monde romain, mais plutôt à une collection d’interventions épigraphiques d’actualité, portant majoritairement sur des inscriptions issues de colonies ou de municipes. On ne peut donc rendre compte de cet ouvrage que communication par communication.

Un bref avant-propos (p. VII-IX) définit ainsi le cadre du sujet : “Les colonies romaines sont donc, jusqu’à la fin du Ier siècle ap. J.-C., des collectivités d’anciens soldats, installés sur des terres confisquées (…)”, ce qui expliquerait le choc ressenti par Rome lors de la “défection d’une partie des colonies romaines” en faveur d’Hannibal. Admettant la possibilité d’accorder le titre colonial à titre honorifique dès le Ier siècle ap. J.-C., les éditeurs, soulignent que cela pose la question du statut personnel des habitants. Refusant la thèse de la “citoyenneté d’Empire”, ils rappellent que la citoyenneté est d’abord celle de la cité à laquelle on appartient. Évoquant l’abondante littérature récente consacrée aux colonies, il concluent que l’épigraphie joue un rôle primordial dans l’étude de ce sujet, par la précision et l’authenticité des données qu’elle apporte face aux sources textuelles : “L’épigraphie nous fait quitter le monde du droit public, pour nous faire toucher du doigt les réalités quotidiennes des colonies (…)”. Il s’agit donc d’approcher “la diffusion et l’adaptation aux réalités locales d’un modèle juridique unique”. Certains historiens auront peut-être quelque difficulté à considérer les sources textuelles – et surtout juridiques – comme imprécises et non-authentiques. On regrette parfois qu’elles aient été écartées, tout comme les textes gromatiques, qui ont pourtant fait l’objet de nombreuses éditions, souvent très accessibles, ces dernières années (voir la bibliographie de base sur le site archeogeographie.org et les publications sur le site d’ISTA à Besançon). Il paraît difficile aujourd’hui de traiter un thème de ce type sur la base d’une seule catégorie de sources, qui, hormis les lois municipales, livre essentiellement des données prosopographiques. De ce fait, certaines des études proposées (Caballos Rufino, Faure – Tran, Rizakis, Buonocore, etc.) auraient gagné à paraître dans des volumes plus ciblés, tout comme d’autres (Paci, par exemple) auraient trouvé sans peine leur place dans des volumes consacrés au thème abordé. Cela n’ôte rien à la valeur de ces communications, qui renouvellent parfois en profondeur des débats anciens.

  1. Caballos Rufino, “Colonización, integración y vertebración. El caso di Italica”, p. 7-39.

L’a. rappelle en préambule que la péninsule ibérique, pour plusieurs raisons, représente un exemple quantitatif particulier de la diversité des formes d’expression urbaines. De cette diversité la communication retient le cas, très particulier, d’Italica, objet de nombreuses discussions. L’a. fait de cet exemple un cas d’école méthodologique, en montrant à la fois la grande diversités des hypothèses historiographiques, souvent contradictoires, et la pauvreté des sources susceptibles de les soutenir. Le large panorama présenté avec un regard parfois hypercritique – mais par méthode plus que par principe – parcourt l’histoire institutionnelle connue ou supposée d’Italica. L’a. relève au passage des indices, comme la présence de noms originaires du Picénum, ou les choix politique d’Italica lors des guerres civiles. S’arrêtant sur l’analyse d’une mosaïque inscrite, mentionnant un préteur ou préfet (AE 1987, 494 ; 1988, 707), il conclut de savantes comparaisons qu’elle pourrait remonter aux années 60 av. J.-C. mais aussi bien dater de la deuxième moitié du siècle. Toujours prudent, il note en conclusion que divers indices permettraient d’expliquer l’attribution du statut municipal, attesté dès le début de l’Empire, à César, mais que l’on ne peut, en toute objectivité, exclure une datation Augustéenne. Cet article, relativement bref pour l’ampleur du sujet traité, est une mise au point, qui donne au non-spécialiste l’ensemble des sources, discutées sans préjugé. On en vient presque à souhaiter des prises de positions plus “positivistes”, mais on doit savoir gré à l’auteur d’avoir évité systématiquement l’affirmation, au profit de la lecture critique des sources.

  1. Faure, N. Tran, L. Nonius Asprenas (CIL XII 1748) et les origines de la colonie de Valence (Gaule Narbonnaise), p. 43-64

L’histoire et les origine de la colonie de Valence constituent depuis plus d’un siècle un sujet de débats. Si l’archéologie a permis depuis peu de faire remonter l’occupation du site aux années 40 av. J.-C. (Voir Silvino et al, Gallia, 2011), l’examen renouvelé de deux documents textuels bien connus, l’inscription perdue de Nonius Asprenas et le texte de Pline permet aux auteurs d’apporter leur pierre à la datation de la colonie. Les a. parviennent à la conclusion que le liste plinienne est probablement géographique, et donc compatible avec la date probable de l’inscription d’Asprenas, qu’ils proposent de placer de préférence avant le consulat de 36 av. J.-C., mais au plus tard dans les années 20 av. J.-C. Valence pourrait donc être une colonie romaine de la fin de la République, peut-être dans le cadre des fondations de Ti. Claudius Nero. Les a. envisagent cependant aussi la possibilité que l’inscription soit antérieure à la fondation formelle de la colonie, l’expression coloni et incolae désignant alors des “colons au sens agraire” (une notion qui m’échappe quelque peu) et des indigènes. L’appui des sources gromatiques ou juridiques (les travaux de L. Gagliardi sur les incolae, par exemple) serait souhaitable pour soutenir cette interprétation. On regrettera cependant le poids d’un dossier historiographique compliqué, finalement bien peu utile compte tenu de la qualité de la démonstration offerte par les a.

  1. Christol, Ressources des colonies, ressources de l’État, p. 65-86.
  2. Christol revient ici sur la terminologie du cadastre d’Orange, dont il explique d’emblée que, destiné à rétablir les revenus de la colonie, il ne comporte pas de définition statutaire précise des terres “ex tributario“, assignées aux colons, avec leurs privilèges, ni des terres Tricastinis reddita, puisque la fiscalité de ces dernières ne concerne pas Orange. L’analyse se concentre donc sur la notion de tribut, en particulier dans son opposition ou sa complémentarité avec le vectigal versé à la cité. L’a. insiste sur le rôle clé du cens augustéen, durant lequel les statuts des terres ont sans doute été définis, ainsi que leur valeur fiscale, fondée sur leur surface, leur taux d’imposition et leur qualité, déterminée par l’administration et non par professio des possessores. Notant que la mention de “tributum” semble contradictoire avec Gaius, 2, 21, pour qui la terre des provinces sénatoriale est plutôt “stipendiaria“, il conclut que cela tient au fait que la Narbonnaise relevait du Prince dans le partage de 27. La terminologie institutionnelle se serait ainsi maintenue. Il conclut finalement que le vectigal, perçu au bénéfice de la colonie, n’empêche pas un terrain d’être soumis au tributum, au profit de l’État. On peut regretter que ce sujet de fond n’ait pas fait l’objet d’une véritable monographie appuyée sur les textes gromatiques et juridiques, la fiscalité du sol ayant fait depuis le XIXe siècle l’objet de très nombreuses études.
  3. D. Rizakis, Une praefectura dans le territoire colonial de Philippes  les nouvelles données, p. 87-105.

Se fondant sur deux nouvelles inscriptions, A. Rizakis propose une restitution du territoire de la colonie triumvirale de Philippes en cohérence avec la cartographie des inscriptions latines connues entre plaine de Philippes et plaine odomante, ainsi qu’avec une borne déjà connue, marquant la limite entre la colonie et un domaine privé. Il peut ainsi démontrer l’existence d’une préfecture de Philippes, située à 60 km de la ville, dont elle est séparée par un groupe de cités macédoniennes connues dans les inscriptions sous le nom de Pentapole. L’a. ajoute ainsi un exemple à la liste des préfectures de colonies attestées. Il propose à titre d’hypothèse d’associer la création de cette préfecture à l’envoi à Philippes de colons antoniens chassés d’Italie par Octavien. La mention de septemvirs, dédicants de l’une des inscriptions à IOM et au Diuus Augustus, reste relativement peu claire. L’a. propose de les rapprocher de collèges de sept ou huit membres, connus par ailleurs, dont les fonctions sont proches de celles des sévirs augustaux ou de collèges administratifs, dont certains exemples sont attestés dans des préfectures. Bon connaisseur des textes gromatiques, l’a. démontre ici la validité de leur propos dans un cas pratique, presque cas d’école, parfaitement confirmé par l’épigraphie.

Cl. Zaccaria, Un nuovo duoviro della colonia romana di Tergeste e la produzione di olio nell’Istria settentrionale, p. 107-121.

L’a. prend argument de la découverte d’une stèle funéraire d’un duovir de Trieste, L. Iturius Corinthus, pour proposer un développement général sur l’oléiculture antique en Istrie. Le rarissime gentilice Iturius est considéré comme nord-italique, voire celtique. Le nom se rencontre aussi sur des briques et amphores istriennes. Le duovir pourrait être un parent d’un Iturius impliqué dans une affaire de palais sous Néron. C’est donc sans doute une nouvelle famille de propriétaires exploitants en Istrie que nous fait découvrir cette inscription.

  1. Laffi, Magistrature coloniare : una messa a punto, p. 125-133.

Après un rappel de la règle général, qui veut que les magistrats supérieurs des colonies romaines portent respectivement les titres de IIuiri (parfois iure dicundo) et d’édiles (avec des variantes), tandis que ceux des municipes issus de la Guerre Sociale portent le titre de IIIIuiri, avec la précision iure dicundo ou aedilicia potestate, selon leur fonction, l’a. rappelle que la différence de titre correspond à des modalités d’élection différentes. Dans le premier cas, les couples de magistrats sont élus indépendamment, dans le second ils sont élus ensemble et reçoivent ensuite leur fonction. La hiérarchie serait alors établie en fonction du nombre de voix obtenues. L’a. centre ensuite sa recherche sur les rares cas de colonies gouvernées par des IIIIuiri. Les variations occasionnelles peuvent s’expliquer de différentes manière (erreur, permanence d’une pratique ancienne, etc.), alors que les exceptions permanentes demandent une explication qui n’est pas encore possible. Une série d’exemples permet de montrer que les premiers magistrats d’une colonie peuvent porter le titre quattuorviral, remplacé ensuite par un duovirat “normal”. D’autres, comme Aquilée, conservent le quattuorvirat. On rencontre cependant aussi le quattuorvirat dans des colonies nouvellement fondées. Il reste impossible d’expliquer de manière générale les différences institutionnelles. Cette article constitue donc une nouvelle glose au célèbre article d’A. Degrassi de 1950.

  1. Zucca, Ordo decurionum et populus delle civitates della Sardinia, p. 135-145.

L’article fait le bilan des inscriptions issues des cités sardes, et en particulier des deux colonies, Turris Libisonis et Vselis, et qui documentent l’ordo et le populus. On relèvera comme particularité le nombre de 23 curies à Turris Libisonis, chiffre étonnamment élevé et vieux sujet de débats. S’appuyant sur le chapitre XV de la lex Vrsonensis, qui donne les noms des 24 curies, l’a. propose de corriger l’inscription et de faire de Turris Libisonis un doublet d’Vrso, colonie aussi césarienne. Les tribus de Neapolis représentent un des rares exemples d’organisation d’une cité selon le modèle de Rome et ouvrent la question de l’histoire institutionnelle de la ville. Au bilan, la documentation institutionnelle des cités de Sardaigne est particulièrement lacunaire, malgré quelques documents exceptionnels.

  1. Khanoussi, A. Mastino, D’Uchi Maius à Rome… en passant par Pouzzoles. À propos de nouvelles découvertes épigraphiques à Henchir Douamis, en Tunisie, p. 147-177

Cette communication regroupe une introduction développée sur les nouveautés épigraphiques d’Vchi Maius, précédée d’une présentation du site, par M. Khanoussi (en français) et une monographie (en italien) d’A. Mastino, consacrée à l’inscription de Q. Marcius Macrinus. Les découvertes présentées sont issues de campagnes de fouilles du forum de la ville. Sont en particulier renouvelées les lectures de CIL VIII, 26249, qui livre le nom d’un nouveau patron du pagus. Il est proposé de corriger à l’ablatif (et non au datif) la titulature de Marc Aurèle. Une inscription fragmentaire atteste l’existence d’une res publica entre 166 et 169, soit plus de 10 ans avant la date retenue jusqu’ici. Deux bases permettent d’étoffer le dossier des Pullaienii d’Vchi Maius. La seconde partie de la communication est consacrée à la carrière de Q. Marcius Macrinus, procurateur sexagénaire, éclairée par une nouvelle base, malheureusement lacunaire.

  1. Christol, Th. Drew-Bear, De la notabilité locale à l’ordre sénatorial. Les Flavonii d’Antioche de Pisidie, p. 179-218

Il s’agit ici d’une longue monographie consacrée, après bien d’autres travaux (B. Levick, R. Syme), à une famille provinciale qui connut une remarquable promotion sociale. L’article prend argument de la publication en 2006 d’une inscription – dont il corrige la lecture – donnant une nouvelle mention de cette famille et permettant de faire remonter l’origine de sa prospérité à la fin du Ier siècle, alors qu’on la supposait du IIe. D’une analyse onomastique les a. concluent que le surnom Sanctus, fréquent dans les grandes familles anatolienne, mais d’origine gallo-germaine, témoignerait d’une alliance entre des Flavonii coloniaux et une famille indigène d’origine galate. Le surnom Varronianus trahirait de même une alliance matrimoniale avec une famille Varro (gentilice) encore insuffisamment connue. Le dossier des Flavonii permet, d’attestations en hypothèses, d’affiner le stemma familiale en complétant une très abondante bibliographie. On souhaiterait cependant un appui plus ferme de la linguistique aux interprétations ethniques d’éléments onomastiques utilisés en plein époque impériale.

  1. Deniaux, Épigraphie et constructions publiques dans la colonie de Dyrrhachium, p. 219-228

Après une brève présentation de l’histoire de Dyrrhachium, l’a. relève que seul l’amphithéâtre est encore visible et que le reste des constructions publiques n’est connu que par l’épigraphie. On apprend ainsi la construction d’un temple de Minerve par un sévir, d’une bibliothèque par un chevalier et d’un aqueduc par Hadrien, monument restauré par Sévère Alexandre.

  1. Dondin-Payre, X. Loriot, Londres et les colonies de Bretagne, p. 229-264

L’article, qui amplifie un article précédent des mêmes auteurs, se pose comme une mise au point dans un débat de positions entre les tenants d’une intégration forte de la Bretagne dans l’empire et ceux qui préfèrent en relever les particularismes. De ce fait, il se présente en partie comme un compte-rendu de publications britanniques récentes. Les a. relèvent que rien, dans les quatre colonies connues, Camulodunum, Lindum, Gleuum et Eburacum, ne les distingue des autres cités de l’empire, au plan institutionnel. Suit une brève présentation des colonies avec leurs singularités, comme la présence de tuiles estampillées par la R(es) P(ublica) G(leuensium) à Gloucester. La diffusion des tuiles parfois à plus de 40 km est relevée mais non expliquée. Les a. s’intéressent ensuite au cas de Londres, qui bénéficie d’une découverte épigraphique récente (AE, 2002, 882), attestant son nom formé sur un toponyme et non un ethnique. Sans être siège de légion, Londres accueillit cependant le siège de l’administration procuratorienne. Le rôle de Londres comme capitale est discuté et n’est attesté avec certitude que tardivement. Cependant, la présence de représentants de l’empire et de soldats, ainsi que l’important développement urbain laissent supposer un statut privilégié, peut-être municipal, sous les Flaviens ou les Antonins.

Nouveautés épigraphiques

  1. Armani, Fragment d’épigraphie municipale sur bronze. Un nouveau document découvert à Seilh (Haute-Garonne), p. 267-282

L’article porte sur un fragment d’inscription sur plaque de bronze, découvert dans les années 1980 et resté longtemps ignoré. Le fragment était certainement en position secondaire car il est tordu, partiellement calciné et a été trouvé à plus de 10 km de Toulouse, mentionnée dans l’inscription. Plusieurs éléments du texte indiquent que l’on a affaire à une lettre impériale portant sur un conflit ou une demande de Toulouse, résolu (solutam) par un empereur anonyme. L’a. propose de dater ce fragment de la période la plus féconde de la correspondance impériale en Occident, entre 70 et 150. La mention de l’ordo des décurions pose à nouveau la question de l’attribution du statut colonial à Toulouse, plusieurs dates ayant été proposées sur la base d’arguments variés. Sur la base de l’inscription des Récollets, l’a. propose de restituer la mention d’un collège de IIIIvirs avant celle des décurions. Étrangement, les éditeurs ont choisi de ne pas présenter cette étude dans la partie consacrée aux colonies.

  1. Buonocore, Res Publica Aequiculani et Superaequani a confronto, p. 283-303

L’a. revient sur trois inscriptions connues à date ancienne (dont une perdue) et publiées par Dressel. Il montre que les développements proposés pour démontrer l’existence d’un municipe des Aequiculani peut-être précoce (CIL, IX, 4121, dans la lecture de Guarrucci) peuvent être interprétés différemment et que l’on manque d’attestation de magistratures claires. Même le nom de Nersae, parfois proposé sur une base littéraire très fragile, doit sans doute être écarté. Il est impossible de supposer que le municipe augustéen de “Nersae” serait devenu le uicus Nervesiae de Pline.

En revanche, on connaît à Pescorocchiano un centre monumental augustéen, où fut érigée une statue à la Iustitia Augusta et qui bénéficia de l’aide financière d’Hadrien. Deux inscriptions y mentionnent des duovirs. Or l’ethnonyme Aequiculi / Aequiculani est encore attesté en plein IIe siècle. En dérive le toponyme moderne Cicolano. Plusieurs attestations de res publica Aequiculorum / Aequiculanorum ont été retrouvées dans le secteur. On connaît les noms de deux enfant d’un seruus arcarius, Aequicula et Aequiculus. La cité aurait donc pu s’appeler Aequiculum. On trouve dans les Notae Tironianae Aquiculum après Nomentum. Cf. Superaequum / Superaequani. Superaequum est un municipe à duovirs probablement tardo-césarien, en tous cas antérieur à 4 av. J.-C. (Ov., Amores, 2, 6, 1). On revanche, il n’y a pas d’informations sur une éventuelle restructuration territoriale césaro-triumvirale.

Intégrant les résultats de l’archéologie et l’analyse en profondeur de rares témoins épigraphique l’a. propose une étude riche et complexe, qui aurait parfaitement trouvé sa place dans la première partie. Dans le même temps, on ne peut que regretter l’absence de présentation des textes complets et de toute illustration, qui aurait facilité la compréhension pour le lecteur non initié.

  1. Camodeca, La carriera di un nuovo praefectus annonae in un’inedita iscrizione puteolana, p. 305-321.

L’a présente ici, après une longue enquête dans les réserves du Musée de Naples, où les fragments avaient été dispersés, une importante inscription, découverte en 1928 et restée inédite. Le cursus de ce procurateur de haut rang, entre milieu du IIe et début du IIIe siècles, peut être reconstitué grâce à des parallèles bien établis et assurée par une reconstitution numérique, qui permet de mesurer avec précision l’espace disponible pour les éléments onomastiques perdus. Les parties de cursus conservées ne permettent pas d’identifier le personnage honoré avec un Iulianus déjà connu. Le lieu de découverte, l’amphithéâtre de Pouzzoles, a déjà livré une inscription qui semble indiquer la présence d’une schola des nauicularii sous les arcades du portique externe. Ce collège pourrait être le dédicant de l’inscription étudiée ici.

  1. Evangelista, Sacerdozi municipali ed edilizia pubblica a Privernum, p. 323-336

L’a aborde ici, séparément, deux inscriptions inédites parmi celles qui ont été découvertes récemment à Privernum, dans le Latium méridional. Le premier document donne pour la première fois l’association entre le culte de Bona Dea et celui, plus rare, de Copia. Le second porte la liste des évergésies de M. Sulpicius Eutychès, sévir et dendrophore. Ajouté à une petite série déjà connue, ce texte permet de préciser que le terme “sanctum” peut désigner un espace particulier au sein de l’édifice sacré, et peut se trouver dans la partie postérieure du temple.

  1. Cenerini, Un nuovo servus regionarius da Sulci, p. 337-346

L’inscription inédite présentée est issue d’un travail de récupération d’une collection illégale par la brigade spécialisée de carabiniers. Elle fait connaître un esclave regionarius du jeune Néron, sous le règne de Claude, Axiochos. L’inscription provient de l’île de Sant’Antioco, l’antique Sulci. Un certain nombre d’objets issus d’une sépulture et découverts au même endroit sont sans doute à associer à l’inscription. La date proposée pour ce mobilier, ainsi que la présence d’une deuxième inscription mentionnant un esclave de la famille impériale, permet de supposer l’existence dans cette partie de Sulci d’une sépulture de personnels des Julio-claudiens. On sait par ailleurs que Claude avait des propriétés minières à Sulci, qu’il gratifia du statut de municipe c. R.

  1. Paci, Virgilio, Cesare e i fasti Cuprensi, p. 347-358

Le célèbre passage de l’Énéide, 1, 286-290, fait depuis longtemps débat pour savoir si le nom Caesar correspond au futur Auguste ou au dictateur. L’a propose ici de rapprocher ce passage du fragment 1 des fastes de Cupra Maritima, pour les années 47 et 46 av. J.-C. Développant de manière critique l’analyse d’A. Degrassi, l’a conclut, contre le grand épigraphiste, et certainement à raison, que le fragment devait porter, pour l’année 46, la mention des quatre triomphes de César. La mention du triomphe gaulois est complétée par l’affirmation que l'[imperium] avait été porté jusqu’à l’Océan. Ce thème de la propagande césarienne n’est pas attesté par ailleurs, sauf, peut-être dans le passage de Virgile, s’il s’agit bien d’une allusion à César. Le sujet dérive de l’imitatio Alexandri, chère à César, mais sans doute aussi utilisée pour détruire l’image de Pompée par une amplification de l’héroïsme. Quoique le lien éventuel entre le texte des fastes et celui de Virgile soit indémontrable, ils présentent une parenté qui oblige à penser que, si Virgile fait allusion à Auguste, il le fait à travers des réminiscences césariennes. G. Paci apporte ici une pierre importante à un débat ancien et animé. Cet article devrait idéalement être publié dans une revue ou un volume plus approprié.

  1. Panciera, La produzione epigrafica di Roma in età repubblicana. Le officine lapidarie, II. Nascita e sviluppo del sistema abbreviativo, p. 359-385.

Dans la continuité d’un travail présenté à Helsinki en 1991, l’a reprend l’analyse formelle d’un corpus largement étendu d’inscriptions qu’il date de l’époque républicaine. Il distingue d’emblée les faits linguistiques des abréviations proprement dites. Il en conclut que les abréviations par contraction ne sont pas antérieures au début de l’Empire. En revanche, les abréviations de prénoms présentent des caractéristiques qui démontrent leur haute antiquité, au moins à partir du IVe siècle. Aux IIIe/IIe siècles on rencontre des abréviations de fonctions de magistrats. Dès la fin du IIe siècle apparaissent les titres abrégés des magistri uici et pagi. Les plus anciennes mentions de la tribu, toujours abrégées, se placent entre fin IIe et Ier siècle. La mention de la pedatura apparaît à la fin du IIe siècle, se maintient durant toute la République et encore en partie au Ier siècle ap. J.-C. À terme, on peut espérer que l’auteur livrera, sous forme de monographie, l’ensemble des critères chronologique qu’il sera parvenu à identifier.

  1. Mennella, Marco Lollio consul sine collega e la fondazione di Augusta Taurinorum, p. 387-394

La fondation coloniale de Turin n’a laissé aucune trace dans les sources. La découverte d’une inscription fragmentaire sur pierre non taillée apporte cependant un élément nouveau par la mention de M. Lollius, consul en 21 av. J.-C. L’inscription, qui porte seulement le nom (sans cognomen) du propriétaire au génitif, ne correspond pas à un texte funéraire mais plutôt à une borne de propriété, mais sans relation avec les bornages définis par les gromatiques. Ce pourrait être une marque de propriété à proximité des alluvions de la Doire Ripaire, au cours très irrégulier : Sex. Statorius aurait pu, avec ce bloc, revendiquer une portion d’alluvions, théoriquement attribuée au domaine public. On en déduira que la colonie de Turin était déjà fondée, ce qui conduit à placer la date de déduction entre 27 et 22 av. J.-C., en cohérence avec les hypothèses actuelles.

  1. Cresci Marrone, Novità epigrafiche da Altinum, p. 395-407

L’a. revient sur l’important dossier des inscriptions républicaines d’Altinum, plus nombreuses qu’attendu et qui présentent un nombre important de familles latinophones. Une amphore de la première moitié du Ier siècle, en remploi, portant un important graffito vient en effet confirmer archéologiquement la chronologie proposée et le rôle d’avant port d’Altinum pour les familles commerçantes d’Aquilée. Le texte livre quatre noms, auxquels sont associés des nombres d’amphores et des poids. Ces noms sont attestés par ailleurs à Altinum. Cette découverte permet de reprendre à frais nouveaux l’étude d’une urne cinéraire proto-augustéenne de Venise, sur laquelle apparaissent certains de ces noms, ainsi qu’un relief, moderne ou plutôt antique christianisé. L’urne serait donc originaire d’Altinum et aurait pu subir une transformation du relief lors de la réfection de S. Pietro di Castello, afin de réaliser les 4 images de S. Pierre inscrites dans le contrat de l’architecte. On souhaiterait une présentation complète du graffito sur amphore, dont l’importance pour l’histoire d’Altinum et de ses liens avec Aquilée est incontestable.

  1. Orlandi, Pomona epigrafica, p. 409-420

L’édition intégrale de Pirro Ligorio a permis de mettre en évidence la manière dont l’artiste a pu fabriquer des inscriptions ou des monuments à partir de donnés réels. L’a examine ici l’inscription CIL, VI, 804, à Vortumnus et une inscription moderne à Pomona.

Michel Tarpin

mis en ligne le 7septembre 2015