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Un nouvel ouvrage prend désormais place dans la riche collection de textes édités par Michel Patillon depuis la parution en 2008 du tome I du Corpus rhetoricum, et surtout du tome II paru la même année et qui comprenait l’édition, la traduction et l’annotation des États de cause d’Hermogène (fin du IIe siècle de notre ère).

Dans le présent volume, Michel Patillon s’attache donc à poursuivre la longue histoire des ouvrages qui s’inscrivent dans le sillage de l’œuvre d’Hermogène, plus précisément ici de sa théorie des « états de cause », une doctrine centrale dans l’histoire de la rhétorique qui examine, à partir de questions initiales, les étapes successives par lesquelles chaque partie doit passer pour prendre position dans une controverse.

D’ambition intellectuelle modeste, assez lourdement pédagogique mais toujours guidé par le souci d’une grande clarté (c’est ainsi que Michel Patillon le présente), Marcellinus a probablement rédigé son commentaire dans la deuxième moitié du Ve siècle de notre ère, à une époque où l’enseignement de la rhétorique semble connaître une certaine baisse de niveau. Son commentaire aux États de cause d’Hermogène n’a pas été conservé à part, mais nous a été transmis dans un compilation, dite « CompilationPy », qui emprunte à trois auteurs généralement cités dans le même ordre : Syrianus[1], Sopatros[2] et Marcellinus, et qui est aujourd’hui conservée dans le Parisinus graecus 2923 (Py) daté du XIe siècle. Michel Patillon édite ici le texte grec de ce manuscrit en prenant également en considération la tradition indirecte : comme il le rappelle en effet, cette « CompilationPy » est une source du « Commentaire Π », repris dans un corps de doctrines, le Corpus Π, datant du vie siècle et aménagé aux IXe ou Xe siècles. Cette variante, désignée comme le « Corpus P », est conservée dans le Parisinus graecus 1983 et dans le Parisinus graecus 2977, tous deux du XIe siècle.

Réunissant les passages attribués à Marcellinus, Michel Patillon parvient ainsi à reconstruire son commentaire et à en proposer une lecture continue afin de rendre à cette œuvre une certaine unité.

Après une brève introduction (p.VII-IX), le contenu du volume est présenté avec un résumé analytique du texte de Marcellinus et les références au De statibus d’Hermogène (p. IX-XXVIII) que commente Marcellinus. La tradition manuscrite est décrite aux p. XXVIII-XXIX. Le texte grec édité, avec les apparats et la traduction française – la toute première traduction de ce texte dans une langue moderne ! – occupent les p. 1-314. Outre la limpidité et la précision de la version française, dont la qualité n’a d’égale que celle des textes précédemment produits par Michel Patillon dans les volumes édités dans la Collection des Universités de France, il faut ici saluer l’important et précieux travail d’annotation. À la fois courtes et denses, les notes (en bas de page et présentées aussi sous la forme de notes complémentaires aux p. 315-358) facilitent la lecture du texte en éclairant le contexte du De statibus d’Hermogène ici commenté et les passages d’autres auteurs mentionnés (comme Démosthène par exemple), identifient comme tels les passages de Marcellinus au sein de la « CompilationPy », soulignent la façon dont l’enseignement de Marcellinus diverge de l’enseignement des autres maîtres de rhétorique, ou établissent au contraire des parallèles entre Marcellinus et les autres exégètes du corpus hermogénien (comme Eustathe, Sopatros, Porphyre).

Un index nominum, un index des titres cités, un index uerborum, un index des noms propres et une table des lieux cités (p. 359-385) viennent compléter ce volume – un volume vraiment indispensable, non seulement pour prendre toute la mesure de la riche tradition exégétique suscitée par l’œuvre hermogénienne, mais aussi pour appréhender ses transformations, ses enseignements, et son importance au fil des siècles.

 

Frédérique Woerther, CNRS, UMR 8230/ENS Ulm.

Publié en ligne le 25 juillet 2023

 

[1] Voir Syrianus, Sur les États de cause, texte établi et traduit par Michel Patillon, Paris, Les Belles Lettres, 2021 (p. 199-264).

[2] Voir Pseudo-Sopatros, Sur les États de cause d’Hermogène, texte établi et traduit par Michel Patillon, Paris, Les Belles Lettres, 2022.