Les éditions Lambert-Lucas ont pris la belle initiative de reproduire à l’identique le très bon livre de Jean Haudry, qui fit date en son temps, L’indo-européen, paru en 1979 dans la collection Que Sais-Je ? des PUF et réimprimé avec quelques corrections en 1984 et 1994. Le texte de 1994 est heureusement complété par une mise à jour bibliographique de 21 pages établie par Pierre Ragot et divisée en trois rubriques, à savoir « ouvrages et manuels généraux » (18 titres), « culture, poétique, lexique » (8 titres), « ouvrages consacrés aux principaux dialectes indo-européens » (18 pages toutes très denses). On retrouvera donc l’enseignement complet de Jean Haudry. Il se terminait par une bibliographie sommaire, qui a été reproduite telle qu’elle se présentait, sans être intégrée dans les longues listes de Pierre Ragot, ce qui compliquera un peu la recherche du lecteur. On ne saurait rédiger la recension du contenu d’un ouvrage mis à la disposition du public plus de vingt ans auparavant et maintes fois analysé par divers spécialistes comme on examinerait un livre nouveau récemment sorti des presses. Aussi se contentera-t-on de dire que dans les sept chapitres (Phonologie, Morphologie, Composition, Syntaxe de la phrase simple, Syntaxe de la phrase complexe, Phraséologie, poétique, métrique), les acquis transmis constituent des bases scientifiques solides, complétées par des hypothèses parfois audacieuses, les unes aujourd’hui admises, alors que quelques autres sont encore toujours plus ou moins discutées, mais qui toutes se sont révélées également stimulantes pour la réflexion et la recherche ultérieures, comme il est facile de le constater. Le cadre éditorial primitif strictement restreint (128 pages) ayant contraint l’auteur à condenser et à limiter son expression, on peut regretter que les conditions de la réédition récente ne lui aient pas offert la possibilité de compléter, de mettre à jour, voire de développer son exposé. Il aurait pu, en effet, défendre celles de ses positions qui ont été moins bien accueillies que les autres et approfondir certaines de ses analyses en les ouvrant parfois utilement à des branches de l’indo-européen dont le témoignage a peut-être été trop peu sollicité, comme le celtique. Mais cela n’empêchera pas que cet ouvrage demeure ce qu’il est déjà devenu depuis longtemps, un grand classique, parmi d’autres qui sont plus étoffés, de la présentation de l’indo-européen, accessible non seulement en français, mais aussi en russe et en japonais. La bibliographie nouvelle, quant à elle, rendra de grands services à tous ceux qui souhaiteront approfondir leurs connaissances dans le domaine de l’indo-européen et de ses dialectes. Même si elle présente quelques inévitables lacunes (la traduction anglaise par J. Nichols, comme l’original russe, du livre de Th. V. Gamkrelidze et de V. V. Ivanov, Indo-European and the Indo-Europeans, parue chez De Gruyter en 1995 et rééditée en 2010, n’est pas mentionnée, pour citer un exemple), elle témoigne de l’extraordinaire vitalité dans le monde des études indo-européennes pendant les dernières décennies. À ces études, Jean Haudry, est-il besoin de le rappeler, a apporté d’importantes contributions au nombre desquelles prend place celle que représente ce livre savant en forme de manuel, dont on se réjouira de savoir qu’il est de nouveau mis à la disposition d’un large public grâce à cette réimpression bienvenue, d’autant plus opportune qu’elle est accompagnée d’une bibliographie actualisée, qui est bien conçue et fort précieuse.
Jean-Pierre Levet, Université de Limoges
Publié en ligne le 12 juillet 2018