< Retour

Le titre de l’ouvrage dont nous rendons compte correspond tout à fait à ce qu’il offre au lecteur. Il s’agit d’un commentaire aux fragments dramatiques de Livius Andronicus et uniquement de cela ; il ne contient pas de biographie de ce poète ni d’aperçu sur son époque. F. Spaltenstein le précise dès son avant-propos : « Je me limite à l’explication des fragments dramatiques dans le cadre de leur intrigue probable, en y ajoutant, le cas échéant, quelques remarques d’ordre plus littéraire et qui peuvent servir à une appréciation plus générale de ce théâtre ». Il ne parle pas du théâtre latin en général (sauf, spécifie-t-il, « lorsqu’une indication de ce genre est nécessaire pour l’explication d’un fragment »). Ainsi, pour avoir une idée, par exemple, du style de Livius tragique, ou de celui de Livius comique, ou pour d’autres aspects de la personnalité de ce dramaturge, le lecteur doit opérer la synthèse des remarques disséminées au fil des pages. L’universitaire ajoute qu’il n’a pas voulu réaliser une édition ; c’est la raison pour laquelle il imprime les fragments sous la forme sous laquelle il apparaissent dans les Remains of Old Latin de Warmington de 1967, (hormis quelquefois pour la ponctuation) sans apparat critique. Dans le commentaire, il fait allusion aux textes que présentent d’autres éditeurs (et parfois avoue où vont ses préférences). Il garde aussi l’ordre du savant anglais — même s’il le discute ici et là. Naturellement une table de concordance et des indications sous chaque passage permettent de se repérer par rapport à la numérotation de Ribbeck (et, à l’occasion, par rapport à celles de Klotz et de Lenchantin De Gubernatis). Lorsqu’il insère un fragment que Warmington n’avait pas retenu, il utilise des chiffres accompagnés d’indice. Sont d’abord pris en compte les débris des tragédies (suivis de la mention de diverses opinions sur l’existence ou non d’une tragédie prétexte de Livius), puis ceux des comédies. Notre collègue ne fournit pas de traduction. Le commentaire de chaque fragment use toujours du même plan, à quelques variantes près. Il commence par une étude de la versification ; suit une recherche sur la situation du passage, sur le personnage qui s’exprime, sur le sens de l’extrait, sur le modèle grec. Le commentaire se termine par une analyse du vocabulaire utilisé, de la morphologie et de la syntaxe. Il recense les opinions et les interprétations de Blänsdorf, Bothe, Bücheler, Carratello, Del Rio, De la Ville de Mirmont, Düntzer, Klotz, Klussmann, Lenchantin De Gubernatis, Morel, Müller, Ribbeck, Traglia, Warmington, etc. Tous ceux qui ont eu à s’occuper d’oeuvres dont il ne reste que des bribes transmises la plupart du temps par des grammairiens, comme c’est le cas ici, connaissent les difficultés de la tâche. F. Spaltenstein fait preuve d’une grande prudence, en essayant d’éviter de lâcher la bride à sa fantaisie. Il se montre sévère envers ceux de ses prédécesseurs qui, selon lui, n’ont pas toujours su résister à cette tentation.
Ce livre est dense. Pour gagner de la place, certains paragraphes sont imprimés dans un corps plus petit et notre collègue se sert beaucoup d’abréviations. De nombreuses parenthèses interrompent les phrases, pour des renvois à d’autres pages de ce volume, à des passages similaires, à des sources, à des opinions identiques ou différentes, à des réflexions personnelles de F. Spaltenstein, etc. Du coup, l’ensemble paraît touffu et le lecteur doit redoubler d’attention pour ne pas perdre le fil. C’est la rançon de la richesse !
Le commentateur indique que sa liste d’auteurs ne comporte que les livres dont il s’est servi, « sans prétendre avoir la valeur d’une vraie bibliographie ». Mais était-il nécessaire d’y inclure « Bailly, Dictionnaire grec – français » ? En revanche, par exemple, comme nombre de fragments contiennent des verbes à la voix active, alors qu’ils sont déponents en latin classique, ou vice versa, il n’aurait pas fallu se priver de la thèse de P. Flobert, Les verbes déponents latins des origines à Charlemagne, Paris, 1975. De même, quelques lacunes apparaissent au fil de la lecture : ainsi l’expression limauit caput (Warm. 26) a été longuement étudiée par M. Giovini, « Limare caput : Nonio, Livio Andronico e il più antico sintagma erotico della letteratura latina », dans Prolegomena Noniana III a cura di F. Bertini, Gênes, 2004, p. 47 – 62 qui n’est pas cité ici.
L’ouvrage se termine par des index qui rendront de grands services : outre, la table de concordance, on trouve, en effet, un index des termes latins, un index des « Idées, motifs, objets », un index « Grammaire, poétique, métrique, théâtre », un index des auteurs antiques et un index des auteurs modernes.

Lucienne Deschamps